La mort de Lorenzo il Magnifico

Lorsque Lorenzo mourut en 1492, Michel-Ange avait 17 ans. Avec Lorenzo, il perdit son protecteur, celui qui lui offrait une formation tout en le rémunérant. Le jeune sculpteur inconnu, presque encore un enfant, fut donc jeté dans le « struggle for life ».

Il dut donc retourner chez son père

Il ne perdit pas de temps : peu après la mort de son mentor, Michel-Ange se procura une pièce de marbre et y sculpta un Hercule d’environ 2 mètres 50. Cette oeuvre est aujourd’hui perdue, mais, selon l’historien d’art Charles de Tolnay, il nous en reste un dessin par Rubens, probablement réalisé d’après cette statue, une copie dans les jardins de Boboli à Florence et une ébauche de cire conservé à la Casa Buonarroti à Florence.

Puis il réalisa, pour l’église Santo Spirito de Florence un crucifix de bois, en échange duquel il put disséquer des cadavres à l’hôpital du couvent dont dépendait cette église, afin d’étudier l’anatomie humaine.

Le fils et héritier de Laurent le Magnifique, Piero, ne fut pas à la hauteur de son père. Quant à Michel-Ange, qui dut retourner vivre chez son propre père à la mort de Lorenzo, bien que Piero l’appelât fréquemment chez lui, il semble qu’il perdit le statut de "protégé" pour prendre celui de "serviteur".

Deux ans après la mort de Lorenzo, éclata à Florence une révolte populaire, qui chassa du pouvoir la famille Medici. Michel-Ange, qui avait sans doute eu vent de rumeurs, s’était déjà réfugié à Bologne, peu de semaines avant d’être rejoint par Piero, sa famille et ses partisans. L’explication que donne Condivi de la fuite de Michel-Ange est difficilement crédible, et l’on peut penser que Michel-Ange, bien que lié aux Medici, avait également des amis dans l’autre camp.

Michel-Ange passa par Venise, cité dont la richesse en fasait la rivale artistique de Florence, mais n’y trouva aucun espoir de travail. Il retourna donc à Bologne et y reçut rapidement une commande : réaliser deux (ou trois ?) statues pour l’Arche de Saint Dominique, une oeuvre monumentale placée dans l’eglise dédiée au même saint et à laquelle ont contribué plusieurs artistes.

On reconnaît parfaitement le style de Michel-Ange dans deux statues toujours présentes sur cette arche, un saint Petronius et une saint Proclus. Par contre, l’ange agenouillé tenant un candélabre, pourtant réputé de la même main par les deux biographes, n’évoque en rien le style du sculpteur florentin.

Il passa environ une année à Bologne, puis rentra à Florence. Selon Condivi, il dut quitter Bologne, bien que les autorités de la ville lui aient proposé de terminer l’Arche, parce que le sculpteur qu’il frustrait de sa commande l’avait menacé. Là encore, Condivi revient sur le thème récurrent de sa biographie, l’envie et la jalousie des autres artistes pour le talent de Michel-Ange, noirs sentiments qui les entraînaient dans des complots visant à lui faire perdre commandes et réputation.

Florence était entretemps devenue une république théocratique sous le contrôle de l’étrange Savonarole, mais toute la famille Medici n’était pas en exil : deux frères, Giovanni et Lorenzo di Pierfrancesco de’ Medici, qui avaient été exilés peu avant les évènements par leur cousin Piero, revinrent à Florence soutenir le nouveau gouvernement. Il sont connus tous deux sous le qualificatif de "il Popolano", l’"ami du peuple".

Il semble que Lorenzo il Popolano devint pour Michel-Ange, peut-être pas un protecteur, mais en tout cas une sorte de conseiller : selon Condivi, l’artiste réalisa pour lui un Saint Jean enfant, oeuvre aujourd’hui perdue. Puis, Michel-Ange, sans qu’il en eût la commande, réalisa un Cupidon endormi, grandeur nature, en marbre. Lorsqu’il le vit, Lorenzo conseilla au jeune homme de le vieillir, afin de le vendre comme une oeuvre antique. C’est un marchand d’art de Milan, Baldassare, qui la vendit 200 ducats au cardinal San Giorgio, grand amateur d’antiquités, et en restitua 30 à Michel-Ange.

Le cardinal San Giorgio (également connu sous le nom de cardinal Riario) apprit ce qu’il faut bien appeler une escroquerie, et reprit son argent en rendant la statue qui tomba ensuite en d’autres mains et fut finalement perdue.

Vasari, dans sa première biographie de Michel-Ange, place cet épisode beaucoup plus tôt, avant le départ de Michel-Ange pour Bologne. Condivi comme Vasari soulignent tous deux que c’est le cardinal qui en reçut le plus de blâmes, car, selon les commentateurs de l’époque, la statue était fort belle et valait bien, ancienne ou pas, ses 200 ducats, et l’affaire ne parut pas nuire au renom de Michel-Ange.

Michel-Ange, après cet épisode, partit pour Rome, au service du cardinal. Il resta un an au service du cardinal sans recevoir de lui aucune commande. C’est du moins ce que disent les biographies, mais, dans plusieurs lettres, Michel-Ange parle du travail qu’il effectue pour le cardinal, travail de sculpteur dont nous n’avons aucune trace. Les lettres en question évoquent, d’une manière explicite, qu’il s’agissait d’un travail "à l’antique", et parlent de l’acquisition d’un bloc de marbre pour une statue à taille humaine.

Il quitta le service du cardinal Riario en 1497, et reçut commande de la part de Jacoppo Galli, pour lequel il réalisa un Bacchus de bronze, aujourd’hui exposé au musée du Bargello à Florence, et un Cupidon agenouillé, aujourd’hui perdu. Signalons que le Bacchus a été également réalisé "à l’antique" et que Galli le présentait à ses amis comme une statue antique. Les lettres parlent également de travaux réalisés par Michel-Ange "pour lui-même".

C’est pour Villiers de la Groslaye, cardinal de Saint-Denis, qu’il réalisa son premier grand chef d’oeuvre, la Pietà de Saint-Pierre. Contrairement aux oeuvres qu’il avait réalisées précédemment, elle ne cherche pas à imiter un style. Au contraire, c’est le premier témoignage du style virtuose, unissant la plus grande expressivité à la plus grande beauté, jetant ainsi les bases de ce que l’on nommera le style baroque.

On a beaucoup gloser sur le fait que la mère, Marie, ait l’air si jeune, alors que son fils, mort sur ses genoux, semble un vieil homme. On ne sait si l’on doit sourire ou arrêter sa réflexion sur la réponse qu’en donna Michel-Ange à son élève Condivi : "Ne sais-tu pas que les femmes chastes restent infiniment plus fraîches que celles qui ne le sont pas ?… au contraire du fils de Dieu qui dut prendre forme humaine et qui dut subir tout ce qu’endurent ordinairement les hommes…"

En 1501, il rentra à Florence, où il s’attaqua au David, pour le gonfalonier Piero Soderini. Il réussit si brillamment à utiliser au mieux le bloc qui avait été "gâché" par un précédent sculpteur, que le marbre brut effleurait en plusieurs endroits, où l’on remarquait encore les coups de ciseau de son prédécesseur. Statue colossale de 9 brasses. Sculpte dans le plus secret. Giuliano et Antonio da San-Gallo, architectes et amis de Michel-Ange (du moins Giuliano) le firent transporter sur la place de la Signoria en 1504. 400 écus

Le tour de force était tel que le marbre affleurait en différents endroits.

Il fit un autre David, mais en bronze qui fut envoyé en france.

Deux bas reliefs circulaires : le Tondo Taddei et le Tondo Pitti.

Ebauche du Saint-Matthieu

Bas-relief circulaire en bronze de la vierge et envoyé en Flandre

Le Tondo Doni (peinture). Influence clairement néoplatonicienne. 140 ducats après marchandage à l’envers (plus tondi marchande, plus MA augmente ses prix)

Soderini lui demande encore un travail : mise en concurrence avec Leonardo – salle du conseil. Fait un carton. Fait partie des choses qui ont le plus contribué à la gloire du MA.

Autres commandes, qui ne sont pas citées dans les biographies : 12 apôtres pour le duomo de Florence (livraison 1 par an), 4 statues pour la cathédrale de Sienne (voir article sur le pape Pie III dans Wikipedia). A ce rythme, Michel-Ange devrait ouvrir un atelier, se faire aider. A son tour, former des élèves.

Culmine le jour où la statue de David est portée sur la place de la Signoria, grâce à la machinerie de SanGallo, l’architecte et l’ami qu’il aura à Rome.

Une autre biographie, une autre vie de Michel-Ange, un autre destin, le grand homme de Florence. Le pape Jules II en décidera autrement.