Homme d’une intelligence exceptionnelle, Michel-Ange est le plus grand sculpteur de tous les temps, avec sa maîtrise du marbre, de l’anatomie, de l’art de la composition dans l’espace. Reconnu de son vivant comme un artiste majeur, il changea la définition de l’art et la place de l’artiste dans la société, une définition et une place qui sont encore en vigueur aujourd’hui.

L'Esclave mourant de Michel-Ange, exposé au Louvre

L’Esclave mourant est, avec l’Esclave rebelle, l’une des deux statues achevées destinées initialement au tombeau de Jules II. Elles furent ébauchées, avec quatre autres esclaves, à Carrare en 1505.

Connu pour avoir été à la fois peintre, sculpteur et architecte, son oeuvre se hisse aux sommets dans ces trois domaines.

En tant que peintre, son oeuvre majeure, les fresques des plafonds et du mur d’autel de la Chapelle Sixtine, à Rome, a révolutionné l’art de son époque : à la recherche de la grâce a succédé, en tant que quête artistique, la représentation des passions humaines. Même s’il n’avait pas la technique superlative d’un Leonard de Vinci ou d’un Raphaël, il a imprimé à ses sujets un pathos qui a rempli ses contemporains de stupeur et a donné aux peintres de son époque et leurs successeurs, jusqu’à aujourd’hui, une inspiration nouvelle et féconde. Après un Moyen-âge axé sur le divin, l’esprit de la Renaissance a placé l’homme au centre de l’univers, et l’on peut dire que Michel-Ange a fait entrer l’art de son temps dans la Renaissance.

En tant qu’architecte, ses réalisations sont hélas peu nombreuses, mais le peu qu’il a réalisé et qui subsiste aujourd’hui, notamment Saint Pierre de Rome, dont il fut le principal artisan, le hisse au niveau des plus grands. L’art de Michel-Ange, dans le domaine architectural, se caractérise, entre autres, par un parfait équilibre des formes et des proportions, et par un usage d’une rare élégance des ornements. Il est le père du classicisme architectural.

Mais c’est en tant que sculpteur que Michel-Ange a montré le caractère absolu de son génie. Si l’on peut considérer que, toutes époques et toutes régions du monde confondues, l’art de la sculpture a été à son zénith dans l’antiquité grecque, alors Michel-Ange se hisse, dès ses oeuvres de jeunesse, comme son David et sa Pietà, au moins au même niveau. Quant à ses oeuvres de la maturité, tel l’Esclave ci-contre, elles transcendent toutes les époques et attendent toujours un successeur.

On peut citer également l’excellence de ses qualités de dessinateur, ainsi que son talent de poète.

Pourtant, on peut le critiquer sur bien des points. Sur une oeuvre, finalement, assez réduite en nombre, des projets inachevés ou tronqués qui nous laissent un sentiment de frustration. S’il était un dessinateur extraordinaire, il n’avait pourtant pas intégré les techniques picturales fabuleuses d’un Léonard de Vinci, ni la finesse d’un Raphaël : il était un sculpteur qui projetait sur le papier, la toile ou le mur, ses visions tridimensionnelles et y appliquait des couleurs.

Dans le domaine de la sculpture, on peut aussi lui reprocher une relative incapacité à représenter le corps féminin. Ses figures féminines du Jour et de la Nuit, qui ornent les tombeaux de l’église San Lorenzo à Florence, ressemblent davantage à des hommes avec des seins. Pourtant, ses visages de Madonne sont d’une exceptionnelle beauté.

Car Michel-Ange a, avant tout, représenté l’objet de son désir. Il était un sculpteur, et un sculpteur homosexuel : il a imprimé aux corps qu’il sculptait dans le marbre toute l’intensité de ses propres émotions. Sa technique éblouissante, que peu de sculpteurs retrouveront après lui, lui en laissait l’absolue liberté.

Il semble avoir peu appris de ses contemporains : il n’est resté que quelques mois dans l’atelier du peintre Ghirlandaio, juste assez pour en apprendre les techniques de base. Sa principale source d’inspiration provient des jardins de San Marco, à Florence, propriété de la famille des Medici (Médicis), où celle-ci avait rassemblé toute sa collection de sculpture grecque antique, hellénistique et ses copies romaines. Là, seul avec ses ciseaux, il observait, copiait, s’imprégnait de tout ce qui faisait le génie des sculpteurs grecs, à la fois en terme de technique et de beauté artistique.

Il a également été fortement influencé par les philosophes néo-platoniciens de Florence, proches de Laurent le Magnifique, notamment Marcilio Fissino et Angelo Politiano (connus en France sous les noms de Marcile Fissin et Ange Politien).

Plus qu’un génie artistique, on peut voir en Michel-Ange un génie tout court, un homme à l’intelligence exceptionnelle qui a bouleversé l’art de son temps pour le faire entrer dans la Renaissance, lui donnant un sens qui est encore celui de l’art de notre temps.